Quatre mois après le début des émeutes, presque jour pour jour, le Haut-commissaire de la République a fait le point sur la situation de la Nouvelle-Calédonie, plombée économiquement par cette crise insurrectionnelle. Si la situation s’est améliorée de manière générale, certaines zones, à l’image de Saint-Louis, demeurent toujours problématiques.
LVDC : Depuis le 13 mai, la Nouvelle-Calédonie est confrontée à une crise insurrectionnelle sans précédent. Un peu plus de quatre mois après le début des émeutes, quel point de situation sécuritaire peut-on faire ?
LLF : Il y a tout d’abord un rétablissement de l’ordre public en Nouvelle-Calédonie. Ce qui ne veut pas dire que tous les voyants sont au vert partout. Sur Nouméa, nous avons de façon récurrente, même si c’est beaucoup plus calme depuis un mois, des problèmes avec les populations jeunes qui vivent dans les logements sociaux et dans les squats. Les secteurs les plus touchés sont Rivière-Salée, Kaméré, Vallée-du-Tir et dans une moindre mesure Magenta et Tuband. Ce des petits groupes, des petites équipes. Ils ne sont pas très nombreux. Selon les dires des policiers, de la brigade anticriminalité, ce ne sont pas des jeunes qui sont compliqués à gérer en matière d’ordre public, parce qu’en fait ils ne résistent pas. Ils jettent des cailloux, mettent des obstacles sur la voie publique et ça ne va pas beaucoup plus loin. On a le sentiment que ces jeunes veulent jouer avec les forces de l’ordre. À Dumbéa, des points durs persistent également à Apogoti et à Koutio. À Apogoti, c’est au niveau du pont (Dumbéa Mall, NDLR) et sur la route qui longe la voie express qu’il y a encore des problèmes. Là encore ce sont des personnes qui sèment le désordre vivent soit dans les logements sociaux, soit dans les squats. À Païta, il y a encore de petites difficultés, mais elles sont très localisées. Enfin au Mont-Dore, le point dur se situe bien évidemment à Saint-Louis, nous y reviendrons plus en détail plus tard.
LVDC : Qu’en est-il en Brousse et sur les îles ?
LLF : En Brousse, les opérations de déblayage des routes se poursuivent. Pour les communes de la côte Est, j’ai demandé aux gendarmes de n’intervenir qu’à la demande des maires. À Poindimié ou encore à Thio, par exemple, ce sont les maires qui nous ont demandé d’intervenir, ce que nous avons fait. Nous sommes capables de faire cinq à dix km par jour pour nettoyer les routes, mais nous le faisons en liaison étroite avec les commandants de compagnie de la gendarmerie. Aujourd’hui, nous avons déblayé 80 000 mètres cubes de déchets qui obstruaient les routes. Nous avons, sur l’ensemble du territoire, enlevé, plus de 5 000 carcasses de voitures. Sur les îles, en revanche, la situation est assez curieuse. À Marée, il y a des destructions d’équipements publics qui sont le fait de la CCAT. À Lifou, il ne s’est pas passé grand-chose, puisque les Grands Chefs ont pris les choses en main. Il faut préciser que l’incendie de la grande case du Wetr est lié à un problème entre coutumiers. À Ouvéa, on constate une hausse des faits de délinquance. Cela s’explique notamment par le « retour » sur l’île de plusieurs jeunes, qui étaient sur le Grand Nouméa au début des émeutes.
LVDC : Vous avez assuré, à maintes reprises, que l’Etat l’emportera à Saint-Louis. Pourtant, la situation demeure toujours identique pour les milliers d’habitants du Mont-Dore Sud au point que l’Etat apparaît parfois impuissant… Pourquoi est-ce si long ?
LLF : Si c’était simple, ce serait réglé depuis longtemps. Les problèmes posés par cette tribu durent depuis cinquante ans mais nous rétablirons l’ordre à Saint-Louis. Le travail est long car l’adversité y est très forte : un gendarme mobile âgé de 22 ans a été assassiné le 14 mai, un émeutier a été tué par un tir de riposte du GIGN le 10 juillet, 313 tirs d’armes très puissantes sur les forces de l’ordre ont été comptabilisés et 65 car-jackings enregistrés, dont 34 commis avec usage ou menace des armes depuis le 13 mai. Notre objectif est de rétablir au plus vite et en toute sécurité la libre-circulation sur la RP1, c’est l’effet majeur recherché. Cela implique un travail d’investigation judiciaire. Notre détermination, celle du procureur et moi-même, est très forte. Nous aboutirons, je vous le garantis. Ma pensée va aux habitants de Mont-Dore Sud, victimes d’une situation inadmissible, à qui je veux exprimer toute ma reconnaissance et mon soutien.
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Propos recueillis par Claire Gaveau et Lionel Sabot