Un conducteur de 69 ans était jugé hier matin pour homicide involontaire. Il a été relaxé, le tribunal estimant que l’accident ayant entraîné le décès d’un piéton, le 18 juillet 2023 vers 1h du matin sur la Savexpress, à Dumbéa, n’est pas de sa responsabilité.
C’est arrivé si vite qu’il n’a pas eu le temps de freiner. « Le choc était inévitable », estime son avocate, Me Servane Garrido-Lucas. « C’était un accident, un vrai accident. » Certes, « tout conducteur doit être maître de son véhicule », mais seulement « au regard d’obstacles prévisibles ». Or, « un homme qui surgit de nul part, sur une voie rapide », cela n’entre pas dans cette catégorie.
« C’est dramatique, cet accident. C’est évidemment dramatique pour la victime, pour la maman » du défunt mais aussi pour le prévenu, qui doit « porter ça », avoir ôté la vie, quand bien même ce n’était pas son intention. Un conducteur de 69 ans qui est, présente son avocate, « un homme très pratiquant, très croyant », qui s’est « beaucoup tourné vers la foi » pour surmonter cette épreuve.
La présidente de l’audience hier au tribunal correctionnel de Nouméa a eu, en conclusion avant de passer au dossier, des mots réconfortants pour le prévenu, « très courageux d’attendre pendant neuf mois » avant d’être jugé pour ces faits, d’autant qu’il s’agit là d’« une infraction qui peut arriver à tout le monde », souligne la magistrate, espérant le voir « repartir » de la salle en étant « apaisé » par la décision qu’elle vient de rendre : la relaxe.
C’est ce qu’avait aussi demandé, un peu plus tôt, Fanny Philibert, vice-procureur. « Je ne vois pas comment monsieur aurait pu l’éviter, il n’y a pas de faute » de conduite, et pas de délit de fuite puisqu’il s’est arrêté et a appelé les secours.
« Percuter » le défunt « sur la voie express c’est la conséquence, mais c’est quoi la cause ? On la cherche, on ne la trouve pas », synthétise Me Servane Garrido-Lucas.
De retour d’un mariage
« La victime revenait d’un mariage à Ko We Kara et remontait vers le squat du Caillou Bleu », à pied, le long de « la voie express » puis « au milieu de la route », détaille la représentante du parquet. « Il n’y a aucun élément qui vient caractériser un manquement ou une imprudence » de la part du conducteur, qui lui « rentrait du travail » : retraité vivant seul, il complète ses revenus en transportant, depuis une dizaine d’années, des personnes montant ou descendant à l’aéroport de La Tontouta. « Cette route, il la maîtrise », note son avocate. « L’endroit n’est pas éclairé, la végétation était dense donc il n’y avait pas de visibilité » sur les côtés, et au niveau de « vitesse j’étais dans la limité autorisée » (entre 70 et 80 km/h selon l’avocate) mais voilà, « il a surgi », se souvient l’intéressé. Inconnu de la justice, il était dans les règles (permis, assurance) et avait consommé ni alcool, ni stupéfiants… au contraire de l’homme percuté, qui lui présentait 2,47 grammes d’alcool par litre de sang (l’équivalent d’au moins douze bières). Il avait aussi fait usage de cannabis dans les heures précédant sa triste fin, et présentait des problèmes psychologiques nécessitant « une piqûre tous les mois », rappelle l’avocate de la défense. Pour la partie civile, il n’y avait personne pour évoquer la victime : ni avocat, ni famille. Le prévenu, lui, a pu compter sur le soutien discret de certains de ses proches, présents à l’audience.
Anthony Fillet