Dix personnes doivent être jugées en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité pour leur implication dans un trafic de grande envergure d’importation de poudre blanche à Nouméa entre 2018 et 2021.
Ils ont inondé de poudre blanche le petit milieu huppé de Nouméa. Dix personnes, parmi elles des organisateurs d’évènements festifs, des chefs d’entreprise, DJ’s ou encore un patron de boîte de nuit, sont appelés à comparaître devant la justice mercredi matin, plus de deux ans après leur interpellation dans le cadre d’un démantèlement d’un important trafic de cocaïne entre le pays et la Métropole.
C’est un renseignement qui avait mis les gendarmes de la Section de recherche sur la piste de ces trafiquants et consommateurs en mai 2019. Au terme de minutieuses investigations qui avaient duré pratiquement deux ans, sous la houlette d’un juge d’instruction, et de multiples discrètes surveillances et écoutes téléphoniques pour déterminer l’implication de chacun des suspects, les enquêteurs avaient procédé à un vaste coup de filet pour mettre un terme à l’importation de plusieurs centaines de gramme de cette drogue sur le territoire.
L’enquête avait ainsi permis de dévoiler qu’un homme d’une quarantaine d’années, à la tête de ce réseau, avait voyagé à plusieurs reprises en Métropole entre 2018 et 2019 où il s’approvisionnait en cocaïne avant de l’acheminer en Nouvelle-Calédonie pour alimenter de manière conséquente le marché. Pour déjouer les surveillances des autorités, le trafiquant présumé dissimulait la poudre « dans ses bagages, et plus précisément dans des flacons ou produits de toilette », avait précisé, à l’époque, le procureur de la République Yves Dupas. Sa compagne, âgée de 27 ans, avait, elle aussi, participé à ces voyages.
Le principal suspect de ce dossier qui a tant fait parler depuis la révélation des faits avait reconnu en garde à vue sa participation au trafic. Lui-même consommateur, il avait affirmé aux enquêteurs qu’il revendait le gramme pour environ 25 000 francs au sein d’un réseau de connaissances ou lors de soirées festives. S’il peut être risqué, le business est particulièrement rentable. Car les bénéfices sont très conséquents puisqu’une fois coupée, la coke était cédée quatre fois plus cher qu’au prix d’achat en Métropole. L’argent était ensuite réinvesti pour mener la grande vie.
Une peine proposée par le parquet
Ce n’est que cette année que la juge d’instruction a définitivement clos ce dossier et renvoyé les protagonistes des chefs d’acquisition, importation, détention, transport et offre ou cession de cocaïne dans le cadre d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), ce à quoi ne s’était pas opposé le parquet de Nouméa.
L’audience se tiendra donc demain et comme le veut la procédure, les prévenus seront d’abord, un par un, convoqués dans le bureau du procureur de la République Yves Dupas qui leur proposera une peine. Si celle-ci est acceptée, les personnes mises en cause seront ensuite présentées à un magistrat du siège qui décidera en audience publique de l’homologation ou non (c’est-à-dire valider ou refuser) de la proposition du parquet. Autre cas de figure, le prévenu peut refuser la peine proposée par le procureur et ce sera alors au tribunal correctionnel de décider de son sort au cours d’un procès.
Ils risquent jusqu’à dix ans de prison
Dans ce dossier, si l’ensemble des suspects (défendus par Mes Céline Joannopoulos, Sophie Devrainne, Frédéric De Greslan, Yann Bignon, Martin Calmet, Maxime Guérin-Fleury, Jean-Victor Bonifas, Patrice Tehio) avaient été placés sous contrôle judiciaire au moment de leur mise en examen par le magistrat instructeur, le principal protagoniste, assisté de Me Barbara Brunard, sera quant à lui extrait du Camp-Est et escorté par les policiers. Il avait, en effet, été interpellé par les douaniers en février dernier alors qu’il venait de réceptionner dans une agence OPT… un kilo de cocaïne pure à 99% soigneusement dissimulé dans une enceinte portable. Jamais jusqu’alors une telle quantité de poudre blanche n’avait été décelée dans un colis sur le Caillou. Mis en examen, le quadragénaire avait été placé en détention provisoire pour ce second dossier qui est toujours en cours. Les dix prévenus encourent une lourde peine d’emprisonnement et une amende douanière. La justice devra en outre se prononcer sur la confiscation d’un compte bancaire, d’une moto et d’une voiture qui avaient été saisis dans le cadre de l’information judiciaire et remis à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.
Jean-Alexis Gallien-Lamarche