Manuel Valls ne manque pas d’idée, ni de mots pour les exprimer. Les idées ne convainquent pas tout le monde, loin s’en faut, mais les mots sont intéressants. Ainsi celui de « démétropolisation », néologisme utilisé lors d’une rencontre avec des élus guyanais pour leur expliquer sa stratégie pour l’Outre-mer. Démétropolisation, qui n’existe pas encore dans le dictionnaire, ça fait toujours moins mal et moins peur qu’« indépendance » ou « décolonisation », qui demeurent néanmoins les grandes lubies du ministre d’État. Le projet n’ayant pas fait florès en Calédonie, autant chercher à le recycler sous un autre habillage. Si l’on parle moins de « décolonisation » en ce moment rue Oudinot, le concept est loin d’être oublié. Artisan de l’émiettement de l’empire, Charles de Gaulle avait sur ce thème une idée bien précise : « En matière de décolonisation, la seule victoire, c’est de s’en aller », disait le général. Tout est dit, et l’on comprend pourquoi les tenants de la France se sont élevés comme un seul homme contre le plan de « souveraineté dans la France » qui, sous des allures patelines, cache bien des dangers. Dans ces conditions, la démétropolisation, si elle ne pose pas en principe intangible le maintien des Outre-mer dans la France, ne sera que le placébo de la décolonisation. Méfions-nous donc du vocabulaire que certains usent pour nous embrouiller.
Nicolas Vignoles