Six ans après le premier référendum, onze jeunes de Païta ont été condamnés par le tribunal correctionnel pour des violences sur les automobilistes et des heurts avec les gendarmes. À la barre, les victimes ont raconté comment, cette nuit du 5 novembre, leur vie a été bouleversée.
Du temps a passé mais ils n’ont rien oublié. Ils en tremblent encore, les larmes aux yeux, au moment de raconter ce qu’ils ont vécu, partagé leurs souvenirs. Au lendemain du premier référendum d’autodétermination, le 4 novembre 2018, un épisode violent avait éclaté à l’échangeur de Paita Nord lorsque des jeunes gens indépendantistes ont voulu contester la victoire du Non. Un épisode qu’on a fini par oublier. Pas les victimes. Six ans plus tard, onze habitants de la tribu de N’dé ont été jugés vendredi à Nouméa.
Obligés de serpenter entre les barricades enflammées érigées au carrefour du littoral, des automobilistes avaient été violemment caillassés. Les affrontements avec les gendarmes avaient duré jusqu’au bout de la nuit. Anne-Marie s’avance à la barre. Elle se souvient encore parfaitement de ce calvaire. Avec son mari, cette infirmière et pompier volontaire, qui rentrait chez elle après une journée de formation, a été prise sous un déluge de pierres. « C’étaient des pavés », rectifie-t-elle. Les tirs sont tendus. « En me protégeant le visage, j’ai reçu un pavé sur la main. C’était si fort qu’elle a été fracturée. » Son mari, au volant, est touché à la tête. Il perd connaissance. « Ça n’arrêtait pas. Ça venait de toutes parts. Nous étions coincés dans le véhicule. J’ai vraiment cru mourir lapidée. » Dans sa voiture, 17 cailloux seront retrouvés… Anne-Marie a vu sa vie bouleversée. « Je ne peux plus me servir de mon index. C’est handicapant pour mon travail. » Son mari, non plus, ne s’en remettra jamais. Sa maladie de Parkinson s’est inexorablement accélérée depuis. Chaque jour, ce couple emprunte cette même route. « À chaque fois, je me demande ce qui va nous tomber sur la tête. »
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Jean-Alexis Gallien-Lamarche