Quand j’étais petit garçon, au siècle dernier, après le traditionnel poulet-frites (maison évidemment) du dimanche midi, et après avoir repassé mes leçons (en chantant), je fonçais devant la télévision, pour regarder une émission devenue culte : « L’école des fans », présentée par Jacques Martin. Le principe était tout simple. Une vedette du show-business venait écouter une dizaine de gosses chanter ses chansons en direct (aujourd’hui on appelle ça du « live »). Après chaque prestation, les enfants recevaient une note de la part de leurs petits camarades. Une addition des scores était alors faite et à la fin de l’émission, et c’était mon moment préféré, au moment de donner les résultats totaux de la compétition vocale, Jacques Martin s’exclamait : « Tout le monde a gagné ! ». Le tout sous les applaudissements nourris d’un public toujours très nombreux au Théâtre de l’Empire, à Paris. Que l’on chante comme une crécelle ou non, que l’on connaisse les paroles de la chanson ou non, que l’on suive le rythme du pianiste (Pino Lattuca) et du contrebassiste (Bob Quibel) ou non, quoiqu’il arrive, tout le monde était heureux puisque tout le monde avait gagné et repartait, au passage, avec un demi-container de cadeaux. C’est curieux parce que, ces trois derniers jours, j’ai eu l’impression d’être au cœur d’une « école des fans » géante. À une différence près. Sans vouloir être désobligeant, on a un peu l’impression que les chansons ont été remplacées par des morceaux de pipeau. Mais comme tout le monde semble aujourd’hui content, satisfait et sous le charme, faisons comme Jacques Martin et exclamons-nous en cœur : « Tout le monde a gagné ! ». Enfin presque tout le monde. Mais ça, on ne le saura que dans un certain temps… dans un Temps X.
Lionel Sabot