A Rivière-Salée, une cohabitation forcée entre habitants et émeutiers

Depuis le début des émeutes, Rivière-Salée est l’un des quartiers les plus à risque de Nouméa. Les forces de l’ordre n’étant pas encore intervenues à l’intérieur du secteur, les riverains assistent, impuissants, à la destruction et au pillage des habitations.

Situés de part et d’autre de la rue, seul quelques mètres les séparent. D’un côté, des jeunes émeutiers, venant en majorité la nuit, brûler et piller des maisons présentes dans ce coin de Rivière-Salée. De l’autre, des habitants du quartier, excédés par ces actes, qu’ils endurent depuis maintenant deux semaines. “On ne dort plus la nuit. On est obligés de surveiller les alentours. Encore hier soir (dans la nuit de mercredi à jeudi), une maison a été pillée. On ne se sent plus en sécurité, on en a marre”, partage Jeanne*, habitant trois maisons plus haut. D’autres maisons ont également été pillées le matin même. Sous les yeux des riverains, désabusés par ces émeutes qui perdurent depuis plus de deux semaines maintenant.

Colère et sentiment d’abandon

Ici, tous n’attendent qu’une chose : que “les forces de l’ordre passent, pour déblayer tout ça”. Les appels se multiplient, sans succès jusqu’à présent. Car si les policiers ont récemment démantelé les barrages situés sur le rond-point à l’entrée de Rivière-Salée, “jamais ils ne sont passés nous voir, il n y a jamais eu d’intervention”, affirme Jeanne. Des propos redondants dans la bouche de plusieurs habitants, las et en colère. “Pourquoi personne ne vient ici ? Pourquoi Kaméré, pourquoi Tindu et pas nous ? On appelle la police tout le temps, mais elle n’est jamais venue”, glissent-ils, presque d’une même voix.

Alors, en attendant, tous s’entraident pour déménager les affaires des maisons pillées, ou sur le point de l’être. Les maisons dont les propriétaires ne sont plus sur place étant les premières ciblées. “Certains, dès qu’ils ont eu l’occasion de partir, ils sont partis. Nous, on reste à contre cœur, car on sait que si on part, ils vont brûler nos maisons. On n’a pas le choix”, explique Jeanne. Une de ses voisines, elle, a décidé d’aller dormir à Savannah, chez de la famille, où “c’est beaucoup plus tranquille”. Mais, elle revient “tous les jours”. “On vient voir la maison, le quartier”, dit-elle.

“Un mal pour un bien”

Au milieu de la rue, situé entre émeutiers et habitants, un barrage a été dressé par des militants de la CCAT. Présents sur place toute la journée, ils ne participent pas aux exactions, mais en sont témoins. Et comprennent, dans un sens, “la colère des petits frères”. Ceux qui ont notamment saccagé une habitation quelques heures plus tôt. “C’est un mal pour un bien. On les traite de délinquants, mais, finalement, c’est grâce à eux que l’on a vu qu’il y avait des armes dans les maisons. Des armes qui sont interdites sur le territoire ! Pourquoi ils ont ça chez eux, si ce n’est parce qu’ils préparent quelque chose ?”, interroge Rodolphe*.

Dès 18 heures, ses camarades et lui ferment leur barrage, pour “éviter que la milice passe”. Et, ils l’assurent, ils resteront sur place, “jusqu’à ce que la loi sur le dégel soit annulée”, affirme Rodolphe.

* Tous les prénoms ont été modifiés.

Nikita Hoffmann

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