Si après une nuit d’émeutes, de violences, d’exactions, et d’actes s’apparentant parfois littéralement à du terrorisme*, on pensait que la journée d’hier aurait été plus calme, il n’en a rien été. Nouméa et les communes avoisinantes ont vécu une véritable journée en enfer.
Au-delà des entreprises pillées et incendiées – nous allons y revenir plus loin -, c’est dans le secteur de Tuband à Nouméa, que cette journée a pris une tournure que personne n’osait envisager, mais à laquelle tout le monde pensait. En effet, dans ce quartier, des habitants se sont regroupés pour « défendre » leur quartier. En conséquence, des affrontements directs entre les jeunes manipulés par la CCAT et ces groupes défendant leur quartier ont éclaté tout au long de l’après-midi d’hier. Les forces de l’ordre se sont bien évidemment interposées. L’autre point d’attention de cette journée du 14 mai aura été la situation à l’usine Le Froid, qui a été en proie aux flammes tout au long de la journée. Un incendie survenu près de cuves d’hydrogène menaçant d’exploser. Les sapeurs-pompiers de Nouméa, appuyés par les pompiers de la DSCGR (Direction de la Sécurité Civile et de la Gestion des Risques) ont évité – jusqu’au moment où nous écrivons ces lignes – une véritable catastrophe, alors qu’une trentaine de personnes est actuellement retranchée dans l’usine depuis lundi soir. « Selon les informations qui me sont communiquées par les forces de l’ordre et les pompiers, le risque d’explosion est très très élevé. Si ces personnes ne sortent pas, il va y avoir un bilan très très lourd, parmi ces 30 jeunes qui sont à l’intérieur de l’usine », déclarait hier, à la mi-journée, le Haut-Commissaire Louis Le Franc.
La terre brûlée
Depuis lundi soir, ce qui marque, c’est le nombre d’entreprises, de grandes surfaces, de docks, etc., qui ont été brûlés sur Nouméa et le Grand Nouméa. Des entreprises qui, pour certaines, assuraient une « fonction » de lien social dans les quartiers dits populaires des communes du grand Nouméa. Hier, c’est dans la zone d’activité de Normandie que c’est parti en fumée.
Les entrepôts des Eaux du Mont-Dore, la GPNC (Grande Pharmacie de Nouvelle-Calédonie), mais aussi des entreprises mitoyennes y ont été brûlées. Dans quel but ? Mêmes interrogations dans les quartiers de la Vallée-du-Tir, de Montravel, de Kaméré, et de Ducos, où plusieurs entreprises ont été partiellement ou totalement détruites par les flammes. Tout au long de la journée d’hier, les scènes de pillages se sont succédé. Sur certaines vidéos publiées sur les réseaux sociaux, on pouvait y apercevoir des pères de famille, des enfants, parfois même des mamans, chariots totalement remplis en main, tous sourires, sortir de telle ou telle grande surface avec le sentiment d’une mission réussie. Bien difficile, au moment où nous écrivons ces lignes, de recenser tous les incendies (plus de 300 à Nouméa pour la seule journée d’hier), toutes les exactions, tous les lieux de violences, tellement ils sont nombreux. Espérons, et si certains croient aux « forces de l’esprit » – comme disait un certain Président de la République -, prions pour que le couvre-feu permette une accalmie. Inutile néanmoins d’espérer un retour à une situation normale. Rien ne sera plus jamais normal en Nouvelle-Calédonie, après ces journées en enfer.
Lionel Sabot
*Définition du mot terrorisme, dictionnaire Larousse : « Ensemble d’actes de violences commis par une organisation ou un individu pour créer un climat d’insécurité, pour exercer un chantage sur un gouvernement, pour satisfaire une haine à l’égard d’une communauté, d’un pays, d’un système ».