Le tribunal administratif vient de donner raison aux quatre sociétés minières – la SLN, la NMC, la SMT et la SMGM – qui avaient attaqué l’augmentation décidée par le gouvernement des tarifs de la redevance versée par les titulaires de concessions minières.
Le gouvernement désavoué par la justice. D’après nos informations, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie vient de retoquer la décision prise par l’exécutif en octobre dernier qui avait pour effet d’augmenter les tarifs de la redevance dite « superficiaire », ce qui constitue un revers pour les autorités dans un dossier empoisonné qui n’en finit plus d’alimenter un contentieux juridique depuis plus d’une décennie.
Dans un jugement du 29 avril, que La Voix du Caillou a pu consulter, les magistrats ont annulé l’arrêté du 11 octobre 2023 qui modifiait une partie réglementaire du Code minier de la Nouvelle-Calédonie. A l’origine de cette requête, la SLN, la NMC (SAS Nickel Mining Company, filiale de la SMSP), la Société des Mines de la Tontouta (filiale des Établissements Ballande) et la Société minière Georges Montagnat qui réclamaient l’annulation de cette décision en soutenant que le gouvernement « n’était pas compétent pour réglementer le montant d’une disposition fiscale » et que « l’augmentation de près de 37 % de la redevance superficiaire présente un caractère confiscatoire ».
L’avis du rapporteur public suivi
Instituée en 2009, cette redevance est prélevée à toutes les entreprises qui disposent de concessions minières sur le Caillou. En 2022, les données officielles, reprises dans le rapport annuel économique de l’IEOM, attribuent à la SLN 51 % des titres miniers, à la NMC 14 %, à Ballande 14 %, à Prony Ressources 8 % et à la SMSP 4 %. Et comme son nom l’indique, cette redevance est proportionnelle aux superficies totales des exploitations détenues par un même titulaire. L’enjeu est là : 234 millions de francs ont été prélevés aux entreprises en 2020 puis affectés au Fonds nickel.
Les sociétés minières se donc sont arc-boutés lorsqu’elles ont appris que les pouvoirs publics avaient fait grimper les tarifs passant à 1 095 francs par hectare (contre 800 francs) pour les domaines miniers dont la surface est inférieure à 15 000 hectares, et à 1 369 francs (contre 1 000 francs) pour une superficie de plus de 15 000 hectares.
Or, aux yeux des juges, le gouvernement a commis une faute car pas « habilité » à adopter des arrêtés réglementaires « incluant les questions fiscales ». « Ainsi, à défaut d’habilitation valablement accordée, les dispositions attaquées de l’arrêté modifiant la partie réglementaire du Code minier sont entachées d’incompétence », peut-on lire dans le jugement. Priant l’exécutif de revoir sa copie, les magistrats ont suivi en cela l’avis de la rapporteure publique Nathalie Peuvrel, selon lequel « seul le Congrès, par la voie d’une délibération, est compétent pour définir le tarif et pour réglementer les modalités de révision de ce tarif ».
Deux mois pour faire appel
Du même coup, la juridiction administrative a trouvé insuffisants les arguments du gouvernement pour justifier l’introduction de nouvelles dispositions, à savoir une révision annuelle des tarifs de la redevance fondée sur la variation en pourcentage de l’indice matériel, de l’indice gazole et de l’indice BTP de l’Isee. Cette mesure « détermine sans habilitation certains éléments substantiels d’assiette dont l’ensemble des modalités de calcul de la redevance. Ainsi, alors que la loi de pays prévoit le caractère proportionnel de la redevance superficiaire, les dispositions réglementaires attaquées organisent une imposition progressive en deux tranches. Enfin, en incluant des éléments extérieurs à la superficie, tels que l’indice gazole et l’indice salaire équipe BTP, les dispositions attaquées intègrent dans l’assiette de l’impôt des éléments qui ne sont pas compris par la loi de pays », concluent les magistrats. La hausse de la redevance superficiaire est donc supprimée. Le gouvernement dispose de deux mois s’il souhaite interjeter appel de la décision.
Jean-Alexis Gallien-Lamarche