Le 1er août 2021, à plus de 83 ans, Alain Houdan a réalisé sa 105e et dernière ascension du 2e point culminant du Caillou. Deux ans plus tard, « le vagabond du Humboldt » n’a pas pour autant raccroché ses baskets. L’aventurier poursuit ses marches à travers le monde, l’écriture et sa défense de l’écologie.
Masques africains, tapas et tiki des îles Marquises, albums photos, cartes postales, livres de voyages… C’est entouré de ses 1001 trésors qu’Alain Houdan nous reçoit dans son antre de Ouémo, à Nouméa, au son d’un opéra de Mozart. C’est ici qu’il vit et cultive le souvenir de ses aventures pédestres, jusqu’à la coupe de son 100e Humboldt et la bouteille de champagne ouverte au sommet. Avec sa moustache finement taillée et ses grands yeux bleus, l’homme ne passe pas inaperçu. Du haut de ses 85,5 ans, son parcours force le respect. Des kilomètres, le randonneur invétéré en enregistre un certain nombre au compteur. Exactement 14 060km pour ses 10 pèlerinages effectués jusqu’à Compostelle, sans compter les bornes qui s’ajoutent à ce palmarès à force de parcourir le monde. Le globe-trotter qui a établi son camp de base en Nouvelle-Calédonie il y a 55 ans, rentre d’ailleurs tout juste de son dernier périple. Un voyage de 5 mois, qui l’a conduit de l’Alsace – où réside sa sœur cadette – au Vietnam, en passant par un demi-tour de France, mais cette fois-ci en voiture avec des pauses randonnées. L’inusable marcheur fatigue à peine et se plaît toujours autant à raconter sa vie.
Inusable marcheur
S’il a toujours aimé marcher, c’est à la retraite qu’Alain s’en donne à cœur joie. A partir de 1998, il enchaîne les treks en Australie, en Nouvelle-Zélande, au Népal et en France. Mais aussi les pèlerinages : à partir de 2006, il se lance sur les chemins de Compostelle depuis la France, l’Espagne et le Portugal. « La plupart du temps, je marchais seul, confie-t-il, même si on n’est jamais vraiment seul car on rencontre des gens de tous pays et de toutes conditions sociales ». Alain pratique aussi la haute montagne, entouré de sommets à 8 000 mètres. Il gravit le Machu Pichu, fait le Tour des Annapurna avec le passage d’un col à plus de 5 000 mètres. Mais c’est aussi et surtout chez lui en Nouvelle-Calédonie qu’il assouvit sa soif de marche et de nature. Une île qu’il connaît comme sa poche pour l’avoir parcourue en long en large et en travers. Le natif d’Alsace se considère d’ailleurs à moitié « comme un Kanak blanc ». Au gré de ses excusions, Alain s’est fait des amis partout. Il faut dire qu’il se lie facilement d’amitié.
Pas l’intention de s’arrêter
Alain Houdan a bien mérité un peu de repos, et pourtant, il continue : à marcher, même si un « peu moins », mais aussi à explorer le monde. « Tant que je suis vaillant, je voyage ». Après les îles Marquises, où il participera en décembre au festival des arts marquisiens, l’octogénaire vise le Rajasthan en Inde en 2024. Il aimerait aussi aller en Égypte, en Grèce et sur la grande muraille de Chine. L’évasion n’est jamais bien loin. Alain continue aussi à organiser des randonnées au mont Humboldt, dont il a été le gardien pendant des années. Son téléphone sonne d’ailleurs toutes les dix minutes pour une réservation, des conseils d’itinéraires… Soucieux de transmettre, Alain est aussi l’un des plus anciens adhérents en activité de l’association pour la sauvegarde de la nature néo-calédonienne (ASSNC), créée en 1971. « Dimanche dernier, on a fait le pic Malaoui par la propriété Lavoix à Robinson, au-dessus de l’ancien foyer indonésien. Trois heures d’ascension ». En octobre, il emmène les marcheurs de l’association à Popidéry à La Foa et en novembre sur la rive droite des grands lacs, à la découverte de ces itinéraires. « Les chemins de randonnée ne sont pas toujours bien indiqués, ni fléchés, il faut connaître les endroits et passages entre les tribus, les propriétés privées… ». Des connaissances qu’il lui tient à cœur de transmettre à ses pairs et à ses deux petits-enfants, dont l’aîné était à ses côtés lors de sa 100e ascension du Mont-Humbolt, le jour de ses 75 ans.
Grand amateur de la langue française et de la littérature, Alain est aussi mordu d’écriture et de poésie. « Dès que quelque chose m’interpelle, je prends la plume », confie-t-il en couvrant des feuilles blanches de sa belle écriture ronde et régulière. Ses sujets de prédilection : l’écologie et la paix.
Beryl Ziegler