Un homme d’une vingtaine d’années a écopé d’une lourde peine de quatre ans de prison ferme pour avoir fait subir à sa compagne des violences répétées alors même qu’elle était enceinte. Le prévenu a réfuté l’ensemble des accusations.
Jusqu’au bout, la juridiction a espéré qu’il allait craquer, qu’il allait enfin dire la vérité, assumer et ne plus se retrancher derrière des mensonges et des contre-vérités. Au tribunal correctionnel de Nouméa, mardi matin, c’est un énième dossier de violences conjugales qui a occupé les magistrats. Mais cette fois-ci, un cap avait été franchi dans l’horreur. Si ce dossier a pu arriver à la barre, c’est grâce à la vigilance d’une sage-femme de l’hôpital qui a émis un signalement après avoir consulté une jeune femme enceinte de sept mois, le 30 juillet dernier. La future maman s’est présentée à son service avec de multiples ecchymoses au visage et de larges abrasions aux genoux. Le médecin a alors fait part de sa grande inquiétude à la fois pour la maman mais aussi pour le bébé « avec un risque de décollement placentaire », ce qui augmentait de fait le risque de décès chez la femme et le fœtus, s’alarme la présidente Hélène Gaillet.
Une procédure est ouverte et la maman de la jeune femme est entendue par les services de police. Elle va alors leur décrire la relation toxique qu’entretient sa fille avec un jeune homme depuis quelques mois jusqu’à tomber enceinte, mais aussi ses craintes pour la vie de son enfant désormais en couple avec un individu qu’elle considère comme dangereux. Elle raconte aussi que c’est au moins la quatrième fois que sa fille est admise aux urgences. « Bras cassé, clavicule cassé, oreille coupée, fracture du nez », liste la présidente.
« Le bébé a failli mourir »
A chaque fois, la victime minimise la gravité de ses blessures et ment à sa mère. Une fois, elle serait maladroitement tombée. Une autre fois, elle aurait été frappée par un groupe de filles dans le quartier. Mais après les coups du 30 juillet, qu’elle a subi au prétexte qu’elle a regardé un garçon dans la rue, elle finit par craquer sous les questions de sa mère. Oui, elle est victime de violences conjugales répétées. Au moment des constatations médico-légales, le médecin évoquera des lésions provoquées « par de multiples coups donnés avec une extrême violence ».
La machine judiciaire se met en branle et le compagnon suspecté est interpellé. En garde à vue, il ne reconnait rien. Il n’a jamais levé la main sur elle, jure-t-il. « Elle ment, c’est du grand baratin. Je n’ai rien à voir avec ces accusations ». A la barre, il affirme que le 30 juillet dernier, il était à une coutume de mariage à Koutio avec ses parents. Entendue, la mère assure le contraire. Acculé par les éléments dans le dossier, le prévenu ne bouge pas d’un iota. « Si je vous suis, votre compagne est frappée au point que le bébé a failli mourir et vous ne vous y intéressez pas ? », questionne la présidente. « Il ne veut pas reconnaître les faits, même jusqu’à l’évidence », plaide l’avocat de la défense, Me Stéphane Bonomo.
Dix-sept condamnations
Abandonné à son enfance, éduqué par ses grands-parents, trimballé de foyers en foyers, d’Ouvéa à Hienghène, de la tribu de Saint-Louis à Nouméa, le jeune homme a une « personnalité impulsive », ne « supporte pas la frustration » et un « fond agressif qui le déborde ». Dix-sept fois condamné par la justice, il est « incapable de nous expliquer où il était pendant les épisodes de violence », résume le procureur de la République Nicolas Kerfridin. Trois ans de prison sont requis. Le tribunal ira plus loin. Une peine de quatre ans de prison ferme est prononcée. Avant d’être reconduit au Camp-Est par les policiers, il demande à la présidente si elle l’autorise à assister au prochain accouchement.
Jean-Alexis Gallien-Lamarche