En Nouvelle-Calédonie, environ 4100 bébés voient le jour chaque année, parfois dans des conditions de vie peu favorables à leur développement. Pour en parler, nous avons rencontré Sandrine Camuzeaux, sage-femme, coordinatrice du réseau périnatal Naître en NC et directrice de la Maison du Réseau, un centre d’hébergement.
Pouvez-vous nous parler du Réseau périnatal Naître en NC?
Sandrine Camuzeaux : C’est l’interface entre les décideurs, les élus, les bailleurs et les gens de terrain. Notre rôle, c’est de trouver des solutions à toutes les problématiques que nous rencontrons sur le terrain, autour de la parentalité, de la périnatalité et de la petite enfance. Nous parcourons les trois provinces du pays, qui ont d’ailleurs des problématiques complètement différentes, ce qui demandent des actions variées et adaptées aux
enjeux.
Quelles sont les différences entre les trois provinces ?
SC : Les enfants du Sud, du Nord ou des Îles n’ont pas les mêmes chances parce que les structures se trouvent majoritairement en province Sud : on ne peut pas mettre des hôpitaux et des spécialistes partout et on privilégie des endroits à fortes densités de population. Dans ce contexte, le rôle du Réseau est de faire un maillage avec les gens de proximité sur le terrain, pour sonner l’alerte en cas de problème et pouvoir agir rapidement.
Quelles sont les problématiques les plus fréquentes en Nouvelle-Calédonie ?
SC : Premièrement, il faut dire que la situation s’aggrave, on le voit depuis une quinzaine d’années. La plupart des familles que nous rencontrons sont aux prises avec un enchevêtrement de plusieurs problématiques. Il existe beaucoup de précarité sociale : des femmes enceintes et des bébés qui ne mangent pas à leur faim, ou pas du tout. Avant, il y avait une aide intrafamiliale, mais aujourd’hui, la précarité est de plus en plus importante et la famille ne peut pas aider tout le monde. On retrouve aussi de la violence intrafamiliale et conjugale, avec souvent un manque de communication des parents vers le bébé. Pourtant, un bébé a des capacités énormes d’échange : il ne faut pas « juste » répondre à ses besoins de base, mais aussi communiquer avec lui. Ne pas le faire peut causer des problèmes irréversibles au niveau neuronal. Et enfin, il y a la problématique de la consommation : tabac, cannabis, alcool… C’est catastrophique. Durant la grossesse, c’est zéro alcool, tout simplement parce qu’on ne sait pas les effets d’un verre, et que cela dépend aussi de la sensibilité du fœtus, impossible à mesurer.
Qu’est-ce que sont les « 1000 premiers jours de vie » ?
SC : C’est une période qui va de la conception jusqu’aux deux ans de vie de l’enfant, qui est absolument fondamentale pour l’avenir de l’enfant, autant au niveau de la santé, des émotions que du bien-être psychique. S’il y a des dysfonctionnements à cette période-là (violences, toxines, alimentation, etc.) cela va impacter le devenir de l’enfant. Si on ne fait rien face aux vulnérabilités du présent, on verra émerger d’autres problématiques dans le futur, comme de la délinquance, des problèmes sociaux ou du décrochage scolaire. Quand on arrive à 3 ou 4 ans en Maternelle et que la maîtresse pointe une difficulté, il est déjà trop tard. Il faut mettre le paquet in utero et sur les deux premières années de vie.
Comment les familles accueillent votre travail ?
SC : Très bien ! Au départ, pas trop, mais quand le maillage de professionnels se met en place, les parents se sentent soutenus. Le rôle du Réseau, c’est d’assurer une continuité de la prise en charge médicale, mais aussi une continuité psychique qui fait qu’ils vont se sentir beaucoup mieux. Il y a une sécurité émotionnelle et psychique et les familles voient qu’on est vraiment là pour leurs besoins.
Êtes-vous inquiète de la situation actuelle ?
SC : Je suis assez catastrophée par la situation. Dans la grande majorité des dossiers, les enfants ont déjà des troubles du neurodéveloppement. Ils ont tendance à se replier sur eux-mêmes, et risquent plus tard d’être inadapté socialement. Les plans de lutte contre les violences ou la délinquance sont fondamentaux, mais en revanche, il faut intervenir bien avant.
Comment savoir si on fait bien les choses en tant que parent ?
SC : Rassurez-vous, la plupart des parents sont d’excellents parents ! Être parent, c’est le métier le plus difficile du monde. Il n’y a pas de recette ! Rattachez-vous à votre bon sens, et tout ira bien.
Kim Jandot
bonjour
L’article sur “l’égalité des chances à la naissance” date de plusieurs années… Je n’ai rien contre le fait d’évoquer à nouveau les thèmes abordés dans cet article mais une mise à jour des informations aurait été cohérente avant de le republier.
Merci
cordialement
Sandrine CAMUZEAUX