Le naufrage du France II, plus grand voilier du monde, près de Moindou

Troisième épisode : l’orfèvrerie Christofle s’approvisionne en nickel calédonien.

En 1885, la première fonderie avait vu le jour à Nouméa, sur ce qu’on a longtemps appelé « la Pointe Brunelet », là où se situent le complexe commercial de Port Plaisance et les immeubles alentour. Cette première usine est un échec. Puis en 1910, construite par les Établissements Ballande, c’est la naissance de l’usine Doniambo. Si fort heureusement pour nous, elle est toujours en place, son implantation urbaine n’est pas sans poser questions et difficultés plus de cent ans plus tard.

La Nouvelle-Calédonie est donc exportatrice de nickel métal et de minerai de nickel.

Autre fait majeur de cette époque, l’orfèvrerie Christofle utilise abondamment le nickel calédonien pour la fabrication de ses couverts.

C’est en fonction de ce créneau économique de transport que peu avant de donner l’ordre de construction de son nouveau navire, la compagnie Prentout-Leblond décide d’affecter sa nouvelle unité au transport du nickel calédonien.

C’est une extraordinaire conjonction entre la Nouvelle-Calédonie, l’empereur Napoléon III, le plus grand voilier du monde, le mystérieux alfénide et l’orfèvrerie Christofle qui va nourrir la suite de cette histoire.

La mission du France II sera de transporter à la fois des passagers et du fret, en particulier, du nickel calédonien.

Or par le nickel, le France II et l’orfèvrerie Christofle sont étroitement liés.

En ce début du 20e siècle, l’orfèvrerie Christofle utilise en effet abondamment le nickel calédonien. C’est une histoire dans l’histoire, mais elle est importante et directement connectée à la destinée du France II.

Et je vais d’abord vous parler de l’alfénide. Qu’est-ce que l’alfénide ?

C’est un métal blanc, très noble d’aspect, ressemblant à de l’argent. Cet alliage composé de cuivre, de zinc, de nickel et de fer, est plus dur que l’argent, résiste mieux au temps et coûte moins cher. Il a été mis au point par les chimistes et orfèvres français Charles Halphen et frères au milieu du 18ème siècle. L’alfénide est utilisé pour la fabrication de cou verts et autres ustensiles de table.

En 1880, la manufacture Alfénide est rachetée par Christofle qui travaille déjà dans son usine de Saint Denis et recourt au Maillechort composé de cuivre, de zinc et de nickel, et donc proche de l’alfénide, pour produire des couverts. Grâce à cette acquisition, Christofle s’assure d’être le seul à produire du maillechort.

Saint Denis est un haut lieu de la fabrication de luxe française. Selon la tradition, c’est Saint Eloi qui y aurait fondé en 635 le premier atelier d’orfèvrerie. Depuis, verrerie-cristallerie, pianos –les pianos Pleyel–, et orfèvrerie s’y côtoient.

C’est à Saint Denis, bien sûr, que l’orfèvrerie Christofle est installée. Cette manufacture a été créée en 1842 par la société Charles Christofle et compagnie. Elle ouvre des filiales en Europe, implante des maisons de vente en Suisse, au Brésil, en Argentine. Mais elle devient célèbre grâce à une commande de l’Empereur Napoléon III– décidemment, l’Empereur est présent partout dans l’histoire de la Nouvelle-Calédonie – qui demande à la manufacture de réaliser de gigantesques décors servant à l’ornementation de ses tables. Cette commande exceptionnelle est suivie d’une autre commande prestigieuse à la manufacture française : celle de l’Empereur du Mexique.

(à suivre)

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