Un retour au calme à Kaméré ?

Difficilement accessible ces deux dernières semaines, Kaméré a dernièrement été libérée de ses barrages par les forces de l’ordre. Comme après le passage d’un violent cyclone, ce mercredi, on y a découvert un quartier ravagé, où peu de structures publiques ont été épargnées.

Trois jours après le démantèlement, par les forces de l’ordre, des barrages situés au sein de Kaméré (une dizaine, au total) l’ambiance était anormalement calme, dans les rues du quartier, ce mercredi matin. Pourtant, l’état des bâtiments publics – ou du moins ce qu’il en reste – témoignent des violences vécues ces dernières semaines. Ici, mis à part les habitations, tout à été – partiellement ou intégralement – incendié et/ou saccagé : la médiathèque – comme cela a été massivement relayé sur les réseaux sociaux – mais également le collège, l’école Gustave Lods, le supermarché Super U, la pharmacie, le centre médico-social, ou encore l’agence OPT.

Marguerite, mère de deux enfants et habitante du quartier, raconte : “Ça a commencé le lundi 13 mai, au soir. Je n’étais pas présente sur place, c’est seulement le lendemain que j’ai vu la pharmacie incendiée. En attendant, ils ont également pillé le magasin Super U. Je suis directement partie voir les jeunes, en leur disant qu’il ne fallait pas brûler, car il y a beaucoup de personnes âgées à Kaméré, et ils étaient très inquiets pour leurs maisons. Tous m’ont assuré qu’ils ne brûleraient pas les habitations, seulement les structures économiques”.

“C’était l’anarchie”

Une ligne de conduite respectée. Exception faite, au sein de la maison de celui ayant tiré sur Jybril, jeune du quartier assassiné le 15 mai. “Ils étaient en colère, c’était uniquement par représailles”, tente de justifier Marguerite. Cet évènement passé, “il n y a plus eu de police, c’était l’anarchie”, commente-t-elle. Un chaos face auquel les habitants, des quatre coins du quartier, se sont solidarisés. “On a fait du troc, en s’échangeant des aliments, ou en se rendant service. C’est bizarre à dire, mais dans ce contexte, c’est là qu’on a vraiment vu le vivre-ensemble. On a rencontré de nouveaux voisins, et on est très solidaires entre nous”, décrit-elle.

Elle-même se relaie jour et nuit en compagnie d’autres personnes du quartier, sous une bâche bleue, pour surveiller les alentours de la rue Schweitzer, où “beaucoup d’anciens” résident. “C’est surtout pour rassurer nos petits vieux. Au début, ce sont eux qui venaient monter la garde, mais on leur a dit qu’on allait le faire, car il fait froid la nuit”, décrit Marguerite.

Mais, dans la nuit du vendredi 24 au samedi 25, les tensions ont de nouveau atteint leur paroxysme avec une nuit de violences et d’incendies, ayant obligé une trentaine d’habitants à fuir par la mer.

“À tout moment, ça peut re-péter”

Si cette dernière comprend l’action de ces jeunes émeutiers, qu’elle analyse – à l’image d’une “cocotte minute qui boue” – comme le résultat d’“un cumul de plusieurs choses ; que sont la vie chère, leur mise à l’écart et les inégalités dont ils sont victimes”, d’autres personnes du quartier, à l’opposé, sont agacés par la situation. C’est le cas de Claudine (prénom d’emprunt), l’une des personnes âgées du quartier. Suivant actuellement des séances de chimiothérapie, elle n’a plus la possibilité de se rendre dans sa pharmacie habituelle pour prendre son traitement. “Je suis obligée d’aller jusqu’à Magenta Plage maintenant ! En plus, y a plus de magasins, plus de médecins, plus rien ! Tout ça, ça ne s’est pas fait en un clin d’œil hein ! Ça a mis des années à se construire ! Je comprends pas ces gens-là, ce sont des gosses qui n’ont pas d’éducation, c’est tout !”, s’énerve-t-elle.

Pour le moment revenu au calme, avec des forces de l’ordre assurant une présence à plusieurs points clés, le quartier de Kaméré se trouve néanmoins sur le fil du rasoir. “À tout moment, ça peut re-péter, surtout si la loi pour le dégel du corps électoral passe, ça va être pire”, estiment Ayana et Marie. Âgées de 19 ans, ces habitantes de Tindu citent également les “bavures policières” comme origine de ces potentiels nouvelles émeutes à venir. “Ceux qui font la résistance, ils brûlent, mais ils n’ont pas d’arme. Et à côté de ça, on a vu hier une vidéo qui montrait des policiers frapper à la tête un petit jeune de Rivière-Salée… C’est pas bon”, préviennent les jeunes femmes.

Nikita Hoffmann

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