« Vous avez joué, vous avez perdu »

Un jeune homme de 19 ans a été condamné hier par le tribunal correctionnel de Nouméa pour une série de faits commis entre le 16 février et le 6 mars, au Mont-Dore.

Chemise couleur bordeaux boutonnée jusqu’en haut, rasé de près, cheveux en place (avec juste une tresse qui dépasse) : le prévenu présentait bien, hier matin. En écoutant la présidente, Hélène Gaillet, énumérer et détailler les vols par effraction (et les tentatives) dont il est accusé (et qu’il reconnaît timidement), le jeune majeur a toutefois fini par trouver le temps long. Il a donc commencé à prendre ses aises dans le box. « Vous pouvez ne pas vous appuyer, monsieur ? Vous n’êtes pas au bar », l’a calmé Isabelle Fuhrer, vice-procureure, réclamant contre lui un an de prison ferme (pour lui « mettre du plomb dans la cervelle »), plus un an avec sursis (avec un suivi durant deux années). Bonus : obligation de soins (contre l’alcool), de travail (ou de formation), d’indemniser les victimes, de payer ce qu’il doit au Trésor public et d’effectuer un travail d’intérêt général d’une durée de 200 heures. « Puisqu’il nous dit qu’il a envie de débrousser, il va pouvoir le faire ! »

Après délibération, le tribunal a suivi les réquisitions du parquet. Déjà emprisonné avant le jugement, le jeune homme le restera au moins pour les douze prochains mois.

« Vous vous servez un peu partout »

Devant la cour, le prévenu a longtemps été taiseux. Poussé plusieurs fois à parler, il a fini par dire quelques mots : des excuses envers les victimes (quatre d’entre elles étaient présentes à l’audience) et des explications sur ces cambriolages répétés, de nuit.

« Vous passez quatre mois en prison pour un vol, vous sortez et vous en commettez quatorze (il en a reconnu treize, ndlr) ! Vous pensiez qu’il allait se passer quoi ? », lui demande la présidente, agacée : « vous vous servez un peu partout », et « c’est traumatisant pour ces personnes de savoir que vous êtes rentré chez elles alors qu’elles dormaient ». Et puis, « on vole des objets et on les balance dans les brousses, c’est quoi l’intérêt ? » Moralité : « vous avez joué, vous avez perdu. Le prix à payer, c’est la prison. »

Le jeune homme raconte, du bout des lèvres, voler par plaisir et n’avoir pas peur des forces de l’ordre, sous prétexte qu’elles ne seraient pas capables d’arrêter les voleurs.

« Rien compris »

« Il n’a pas de notion de ce qu’il faut faire pour bien se comporter dans la vie, il n’a pas de notion du préjudice qu’il cause aux victimes », attaque Isabelle Fuhrer. « Je ne suis pas sûr qu’elles soient vraiment sincères ces excuses », dit-elle. De ses précédentes condamnations et sa récente incarcération, « il n’a strictement rien compris », rien appris. « Quelle autre solution on a ? Quand on a affaire à quelqu’un de 19 ans qui a un palmarès comme ça, qu’est-ce qu’on fait ? Je ne vois pas quel autre moyen on peut avoir que de l’envoyer en prison », aussi car « il y a une certaine professionnalisation dans ce qu’il fait ». Dans cette histoire, il y a des « préjudices considérables » puisque de l’argent, des bouteilles d’alcool, des consoles de jeux, des téléphones, des montres, des papiers d’identité ou encore des voitures ont été, au fil des cambriolages nocturnes, volées par le prévenu (l’un de ses complices sera jugé ultérieurement). « Beaucoup de gens ne reverront jamais leur argent », car « jamais il ne va payer de sa poche pour indemniser les victimes », même s’il en a l’obligation par le tribunal (il doit, déjà, plus de 500 000 francs de dommages et intérêts, somme qui devrait encore grimper). Pour payer, il lui faudrait un travail et un revenu, ce qu’il n’a pas aujourd’hui.

« L’art du home-jacking »

C’est un jeune « perdu dans la vie », résume son avocat, Maître Stéphane Bonomo, soulignant, avec audace, que son client démontre une « intelligence dans l’art du home-jacking, il y a un savoir-faire. Ce n’est pas non plus Arsène Lupin », dans le sens où ce n’est pas un gentleman cambrioleur, « mais pour autant il n’y a pas eu de violence, pas eu d’agression ». Et puis, « il a une loyauté : il reconnaît sans ambages » les vols et les tentatives manquées. « Votre juridiction ne doit pas tomber dans la toute répression », insiste l’avocat. « Ça pose la question de l’impact de l’enfermement : apparemment, ça ne marche pas… » Pour ce jeune homme, qui a arrêté les études en classe de seconde, « sa seule école c’est l’école de la délinquance et le quartier de Pierre-Lenquette, où il a tout appris », avant malheureusement de le mettre en pratique.

Anthony Fillet

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