La préférence nationale dans un État indépendant est une tentation permanente, y compris dans le Pacifique. Aux Fidji, à l’issue de ses deux coups d’État à la fin des années 80, Sitiveni Rabuka avait instauré la prééminence des Fidjiens d’origine mélanésienne sur ceux d’origine indienne. Plus récemment, et comme l’évoquait La voix du Caillou dans son édition du 8 et du 9 mars dernier, le Vanuatu a mis en place une réforme au terme de laquelle seuls les citoyens d’origine mélanésienne auront le droit de se présenter à une élection provinciale ou nationale et de la contester. Chez nous, la limitation du droit de vote aux seuls Kanak a été l’une des principales revendications du FLNKS naissant, qui a trouvé une sorte de concrétisation dans le gel du corps électoral. Cette tentation du repli sur soi et de l’exclusion de l’autre est donc assez largement partagée dans cette Océanie, où l’on promeut pourtant les valeurs d’accueil et de respect. Et tout cela se fait sans que l’ONU bouge la moindre oreille ni que les ONG, organismes ou groupuscules divers trouvent à y redire, eux qui sont pourtant prompts, surtout en ce moment, à jeter l’opprobre sur la Nouvelle-Calédonie dans la France, et à contester l’existence et la présence des Calédoniens d’autres origines que Kanak.
Nicolas Vignoles