Nous avons plongé hier en plein paradoxe. Marine Le Pen, reconnue coupable, a été condamnée, et des deux côtés ça hurle. On crie que les juges tuent la démocratie, tandis que dans le même temps on proteste que le droit doit s’appliquer. Que la candidate déclarée du Rassemblement national soit écartée par la justice d’une élection présidentielle pose un problème, c’est un fait. Que les juges appliquent le droit, en est un autre. On vient de s’apercevoir, dans notre démocratie chancelante, que les juges appliquaient un droit que les politiques leur avaient accordé. Ça n’est pas un juge qui a décrété applicable et légal l’inéligibilité avec exécution provisoire, ce sont bien les politiques qui ont voté cette loi dans un souci de « transparence » et de « plus grande justice ». Si la question demeure de savoir si les convictions politiques des juges transparaissent dans certains de leurs jugements, il n’en est pas moins vrai que c’est le politique qui crée, fonde et instaure le droit. Alors, évidemment, quand ça leur revient en pleine figure, on comprend qu’ils soient étonnés et choqués. La France est un État de droit, et l’on s’en glorifie avec raison. Voyons maintenant quel pouvoir donne le droit.
Nicolas Vignoles