L’époque a ce défaut de démultiplier la capacité d’indignation des uns et des autres. Elle s’exprime (notamment sur les réseaux sociaux ou dans les émissions dédiées) trop souvent avec outrance et véhémence, sans que personne n’en mesure les conséquences. L’un des membres de notre rédaction, ainsi que votre journal La voix du Caillou, en sont aujourd’hui la cible. En cause un éditorial satyrique publié ce lundi 17 mars, qui vaut à notre collègue d’être nommément attaqué et menacé, ce qu’évidemment nous ne laisserons pas sans réponse. Toujours est-il que l’offensive contre nous est rude, menée sans doute par tous ceux à qui nos analyses comme notre ligne éditoriale n’ont pas l’heur de plaire, parce que nous défendons des valeurs, mais aussi, et oui, une Nouvelle-Calédonie apaisée, après qu’elle a été détruite, et dans la France. Alors à l’évidence tous les coups sont permis, y compris de cibler un journaliste au risque d’exciter n’importe quel rageux.
On ne débattra ici ni de la liberté de la presse ni de celle d’expression, notions toujours à géométrie variable selon la manière dont on reçoit ce qu’elle exprime et dénonce, comme c’était le cas dans l’édito incriminé. Car les mots et termes utilisés eussent-ils été différents que la réalité demeurait celle qu’elle est. En effet, la liberté de ton de cet édito (visiblement mal comprise, ce que nous regrettons, même si l’incompréhension est parfois une volonté) n’avait comme objectif que de déplorer une situation et la réalité de ce qu’est devenu le centre-ville, au grand désarroi de la municipalité et de son maire. Et ce n’est pas ce malheureux militaire violemment agressé récemment qui le démentira. Comme la réalité, lorsqu’elle est sombre, est toujours dérangeante, il fallait bien trouver un moyen de créer une affaire dans l’affaire pour que les yeux de l’opinion s’en détournent. C’est toujours l’histoire de la lune et du doigt (« quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt »).
Yann Milin,
Directeur de publication