Sept. C’est le nombre de fois que le député Nicolas Metzdorf a prononcé le mot « humilié », mercredi à l’Assemblée nationale. Sept fois en quatre-vingt secondes d’une charge musclée contre le nouveau Premier ministre, Michel Barnier, coupable selon l’ancien maire de La Foa d’avoir, la veille lors de sa déclaration de politique générale, « abandonné » l’ambition de dégeler le corps électoral pour les élections provinciales, et donc « humilié » les Calédoniens favorables à ce dégel. En entendant pour la quatrième fois le mot « humilié », le ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet, a ôté ses lunettes. La fois d’après, deux secondes plus tard, il se prenait la tête entre les mains, soufflant fort. Le ministre de l’Intérieur, lui, croisait ses bras. Moins d’une minute plus tard, à la fin de l’intervention du Calédonien, le réalisateur, taquin, s’attardait à nouveau sur un Bruno Retailleau le visage grimaçant, semblant témoigner de la compassion après avoir écouté la colère froide du député. Le Premier ministre, lui, aperçu brièvement, restait impassible. À quoi pensait-il ? Sans doute se disait-il qu’il hérite, avec la crise calédonienne, d’un dossier ô combien complexe sur le terrain, quand bien même depuis Paris il ne paraît pas si compliqué à résoudre. Probablement, aussi, prenait-il conscience de la susceptibilité des Calédoniens et de leur tempérament. Si Michel Barnier et son gouvernement n’étaient pas au courant, maintenant ils se sont : chaque mot dans une phrase prononcée par un haut dirigeant de l’État au sujet du Caillou doit être pesé, soupesé, car il peut vous revenir en pleine figure comme un boomerang.
Anthony Fillet