L’Institut de la statistique et des études économiques de Nouvelle-Calédonie (ISEE) vient de faire paraître sa synthèse annuelle sur les salaires des Calédoniens. En quelques mots, la situation se dégrade.
Les salariés calédoniens gagnent en moyenne 345 000 francs net par mois en équivalent temps plein : le salaire moyen des ouvriers et employés est de 249 000 CFP, celui des professions intermédiaires 399 000 CFP et celui des cadres et professions intellectuelles supérieures 649 000 CFP.
Le privé en crise ?
Les salaires des employés et ouvriers sont 27% moins élevés dans le privé que dans le public, et cette différence est de 12% dans les professions intermédiaires. À l’inverse, les cadres et professions intellectuelles supérieures du privé touchent un salaire plus élevé de 5% que dans le public. Cependant, dans le privé, 75% des emplois se situent dans la catégorie « Ouvrier ou Employé », alors que dans le secteur public, 43% des emplois sont dans cette catégorie. Cette répartition explique la différence de rémunération de 33% entre secteur public et privé.
Un retour à la « norme »… pas si réjouissant
En 2022, nous sommes repassés à une situation d’avant crise sanitaire : on dénombre 7200 emplois de plus que l’année précédente. À noter que durant le Covid, les emplois qui ont été supprimés étaient en moyenne moins qualifiés, avec moins d’ancienneté et dans des secteurs moins bien payés. Les personnes qui ont perdu leurs emplois en ont retrouvés ? Oui, mais pour la plupart, ce sont des emplois précaires : 87% de ces « nouveaux emplois » font partis de la catégorie « Employés » (peu ou pas qualifiés). De ce fait, ils contribuent à faire baisser le salaire moyen, qui passe de 348 000 CFP en 2021 à 345 000 CFP en 2022.
Revalorisation des salaires…et des charges
En 2022, le salaire minimal garanti (SMG) et le salaire minimal agricole garanti (SMAG) ont été revalorisés suite à la forte inflation : le SMG est passé de 156 568 CFP (2019-2021) à 163 102 CFP (décembre 2022). Dans le secteur public, seuls les fonctionnaires de l’État ont bénéficié de la revalorisation du point d’indice décidée en France métropolitaine (+3,5% en juillet 2022). Du côté des charges, la contribution calédonienne de solidarité (CCS) est passé de 1% à 1,3% en octobre 2021, puis à 2% en juillet 2022, et ce, pour l’ensemble des salariés du territoire. Le plafond de la tranche 1 du RUAMM a été relevé le 1er janvier 2022, affectant ainsi certains salariés qui doivent payer plus. Enfin, les fonctionnaires de la Nouvelle-Calédonie doivent cotiser davantage depuis mai 2021 à la caisse locale des retraites : 9,5% de 2010 à 2020, 10,17% en 2021, puis 10,5% en 2022.
Une perte de pouvoir d’achat
Les salariés qui n’ont pas perdu leurs postes durant la crise sanitaire ont tout de même perdu 1,3% de pouvoir d’achat en 2022. Les fonctionnaires du territoire font particulièrement les frais du contexte économique difficile : -3,6% de baisse de salaire entre 2021 et 2022. D’autres catégories de salariés sont également concernées par une diminution de pouvoir d’achat : cadres et professions intellectuelles supérieures (-3,1% dans le privé, -2% dans le public), et professions intermédiaires (-2,2%). À l’inverse, les agents contractuels de droit public ont vu leur pouvoir d’achat augmenter de 0,2%.
Écart salarial : les inégalités homme-femme se creusent
Les femmes ont un salaire inférieur de 8,9% en 2022, contre 8,1% en 2021. Comment expliquer cette augmentation ? Les femmes représentent plus de 60% des effectifs relatifs aux « nouveaux emplois » post-covid de 2022, qui sont, comme dit précédemment, précaires et non qualifiés. Comme indiqué dans la synthèse, l’écart de salaire entre les femmes et les hommes passe de 12% en 2021 à 13,3% en 2022 dans le secteur privé, alors qu’il est stable dans le secteur public, oscillant entre 14,5% et 14,6% entre 2020 et 2022. Il y a également des différences notables selon l’âge : chez les moins de 30 ans, une femme gagne en moyenne 1,4% de plus qu’un homme; chez les 30-39 ans, un homme gagne 4,2% de plus qu’une femme; chez les 40-49 ans, un homme gagne 9,6% de plus qu’une femme, et chez les 50 ans et plus, un homme gagne 14,2% de plus qu’une femme.
Un emploi sur cinq est bas salaire
Malgré le fait que le SMG ait été revalorisé 4 fois, il reste inférieur au seuil des bas salaires (160 000 CFP vs 164 000 CFP). De fait, la part des bas salaires reste importante en 2022 (19,8%), et cette préoccupation concerne davantage le privé (24,8% de bas salaires) que le public (7,1% de bas salaires). Cela concerne un emploi sur cinq. Rappelons qu’un bas salaire est un emploi dont la rémunération est inférieure ou égale aux deux tiers du salaire médian de l’ensemble des salariés en entreprise.
Kim Jandot