Hier et aujourd’hui, les uns et les autres rappellent le souvenir des morts des 11 et 12 janvier 1985, à Boulouparis, comme à Canala. J’entends déjà les voix de certains qui s’offusqueront que l’on remue ainsi les ombres du passé, estimant qu’il ne peut rien sortir de bon de ces cérémonies qui nous font replonger dans un passé si lointain et si tragique. Et au « pays du non-dit », ils sont sans doute nombreux à penser ainsi. Mais faut-il mettre sous le boisseau ce qui nous a tant fait souffrir ? En fait, tout dépend de ce que les uns et les autres comptent faire de cette mémoire-là. Ces pauvres morts que beaucoup pleurent encore, nous montrent un chemin, celui que nous empruntons cahin-caha depuis 1988 en dépit de tant d’aléas et de soubresauts. C’est leur mémoire, vivante encore dans bien des cœurs, qui nous a permis aussi de construire la paix, et de poser les bases de cet horizon à atteindre qu’est le vivre ensemble. Il ne sert à rien de vouloir taire le passé, si douloureux soit-il, il est important en revanche que nous parvenions enfin à communier ensemble dans une même histoire, et que nous ne commémorions plus loin les uns des autres, ce qui fait notre histoire.
Nicolas Vignoles