Rencontre avec… Éric Descheemaeker

Juriste et professeur de droit, Éric Descheemaeker a donné la semaine dernière une conférence qui n’a pas laissé indifférent, suscitant conjointement éloges et critiques. Il développe une vision nouvelle, parfois iconoclaste, sur laquelle nous souhaitions revenir avec lui.

La voix du Caillou : On a l’impression que lorsque l’on est juriste et/ou professeur de droit, il faut nécessairement avoir une conscience de gauche, voire d’extrême-gauche, pour être autorisé à parler de la Nouvelle-Calédonie. Vous qui semblez faire exception à cette règle, est-ce votre ressenti ?

Éric Descheemaeker : Je ne sais pas pour ma part où je me situe sur l’échiquier politique – je ne me reconnais réellement nulle part. Mais, pour répondre à votre question, il est certain que l’université est d’une manière générale un monde intellectuellement de gauche, surtout chez les gens médiocres de loin les plus nombreux. Ils pensent que s’afficher « décolonialistes » fera d’eux des gens vertueux, appartenant au camp du Bien. Or, rien ne motive davantage ces universitaires que le désir d’être bien vu par l’opinion dominante, ou plutôt ce qu’ils croient l’être, car ils ont généralement 30 ans de retard sur elle. Il y a aussi un biais plus spécifique : beaucoup de juristes universitaires s’intéressant à l’archipel rêveraient d’accoler leur nom à un nouveau projet politique ou à une loi sur la Nouvelle-Calédonie. Quelqu’un comme moi qui essaye de défendre une forme de statu quo, voire de retour au statu quo ante, n’a aucune chance d’être ainsi reconnu. Cela m’indiffère mais, pour les gens que leur ego intéresse, la chose n’est pas sans importance.

LVDC : Vous portez un regard critique sur l’accord de Nouméa, mais peut-on regarder cet accord de 1998 avec les yeux de 2025 sans risquer de faire un contresens ?

ED : Cela dépend de la question que vous vous posez. S’il s’agit de reconstruire ce qu’il fut voulu, espéré à l’époque, le risque est réel. Mais ce n’est pas cela qui m’intéresse. Ce qui m’intéresse, c’est de regarder un texte juridique (ou para-juridique) et de m’interroger sur sa logique intrinsèque. Or, que cette logique mène vers l’indépendance-association avec un décalage d’une génération est évident en regardant les mots. J’avais d’ailleurs déjà ce sentiment en 1998, à l’âge de 20 ans. Que ce n’ait pas été la manière dont les gens, notamment dans le camp loyaliste, l’aient perçu à l’époque est tout à fait possible, voire probable. Mais je ne suis pas là pour juger de ces choses, encore moins pour décerner bons ou mauvais points. Je regarde des mots écrits sur une feuille de papier avec un regard qui essaye d’être indifférent au contexte politique, d’alors ou, d’ailleurs, d’aujourd’hui, comme le ferait une cour de justice chargée de trancher un conflit d’interprétation.

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Propos recueillis par Nicolas Vignoles

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