« Nous ne laisserons pas les jeunes brûler nos maisons »

Pour répondre aux tensions actuelles et aux débordements, les habitants de différents quartiers de Nouméa s’organisent en milice. Le message n’est pas à la violence, mais à la défense de sa maison, à la protection de sa famille. C’est le cas à Tuband, à Magenta, à Ouémo notamment.

Des buissons, des barbelés, des cadis, des pierres, tous les moyens sont bons pour bloquer les accès aux différents quartiers de Nouméa. Et sur chaque poste de contrôle, plusieurs personnes assurent une ronde. De l’Anse-Vata au Mont-Dore, la milice s’installe et entend bien ne pas se laisser piller.

Elles sont propres à chaque quartier. Les habitants, via les réseaux sociaux ou la messagerie WhatsApp, s’organisent, discutent, alertent. Et, face à l’augmentation des tensions et aux nombreuses scènes, ils ont décidé d’agir. « Nous ne laisserons pas les jeunes brûler nos maisons », assure ainsi un groupe mobilisé près du rond-point de l’Eau Vive, à Tuban. En deux jours seulement, les quelques personnes à l’initiative du mouvement ont vu les groupes se démultiplier. Ainsi, sur ce même barrage des quartiers sud, ils n’étaient que cinq le premier soir. Ils sont maintenant un nombre bien plus conséquent de résistants. « Ils sont venus nous aider, on se mobilise en grand nombre, mais on continue de chercher du monde » souligne l’un d’entre eux. Car, après deux nuits de mobilisation, la fatigue commence déjà à se faire sentir. « Il y a des personnes qui font leur jogging qui nous encourage, mais nous, on veut qu’ils nous rejoignent. Certains sont fatigués, il faut se relayer », poursuivent les habitants.

« Si on se fait agresser, on répond »

En effet, pour certains, les surveillances ont commencé dès lundi soir et sont assurées 24 heures sur 24. Après deux jours et des litres de café ingurgités, le marchand de sable commence à se faire insistant. Il en est de même dans le quartier de Magenta où les deux premières nuits ont été particulièrement éprouvantes. « Ils tentent de venir par les tours, ou par d’autres chemins. » La population des quartiers a rapidement répondu en nombre et les miliciens peuvent s’alterner, en répondant vite en cas d’urgence, grâce aux groupes WhatsApp mis en place. Les différents groupes qui se mobilisent dans la ville suivent le même discours : « On ne provoque pas, on ne tire pas, mais si on se fait agresser, on répond. On veut empêcher les gens de passer. » Des tirs, ils assurent ne pas en avoir donnés « il faut faire attention, il y a des vidéos fake, qui ne sont pas d’ici, disant que l’on tire à balle réelle. Cela est complétement faux. »

Une rencontre avec les habitants des Tours

Si les forces de l’ordre sont venues discuter avec les groupes, ils ont déclaré ne pas avoir de soucis avec ceux-là. Ils ont d’ailleurs besoin de soutien en cette période trouble. « Il faut que tous les quartiers fassent la même chose, la population doit se mobiliser. » encourage un des hommes présents dans la milice. Selon eux, les habitations ne tiendront pas deux heures s’ils laissent les postes sans surveillance. Philippe Blaise, élu de la province Sud, était présent à Magenta. Equipé d’un gilet pare-balles, qu’il a rapidement retiré, l’élu a d’abord dialogué avec les habitants des tours qui nettoyaient les dégâts causés. Il s’est ensuite rendu voir les miliciens, de l’autre côté de la rue avant qu’une rencontre n’ait finalement lieu entre quelques personnes du groupe et un représentant des tours afin de « montrer que la situation est calme ici ». Philippe Blaise a insisté sur le fait que : « Le message à passer, c’est que les gens, tout ce qu’ils veulent, c’est être tranquille. Il faut que tout le monde revienne à la vie d’avant. » « Les parents ont repris les choses en avant dans les tours de Magenta » rapportent le représentant et les personnes autours. De leur côté, les miliciens l’assurent « on ne nous a pas imposé de venir ici, on veut juste calmer la situation. » « J’ai grandi en Nouvelle-Calédonie, j’ai des frères ici », glisse l’un d’eux. Des frères qui en viennent à se faire la guerre.

« On attend l’état d’urgence »

Jean Baptiste, Typhaine, Maxime, Rebecca, Hugo, Mireille sont, eux, mobilisés pour la sécurité de leur quartier, la presqu’île de Ouémo. Depuis lundi soir, les nuits de terreur et les journées de malheur s’enchaînent. « Combien de nuit je vais devoir fermer la porte de chez moi pour garder l’entrée de mon quartier? », questionne Maxime, 27 ans. « Mes parents ne sont plus si jeunes, si je n’y vais pas qui va le faire à ma place? On attend l’état d’urgence et l’armée pour se barricader avec nos femmes et nos vieux. Pour le moment, on doit se défendre », ajoute-t-il. Typhaine, gérante de société, n’a pas hésité à tenir la nuit entière pour s’assurer que d’autres puissent dormir sur leurs deux oreilles : « C’est triste, mais je sais que pour l’avenir de mes enfants il va falloir que je continue à préserver ce Caillou, qui fait partie de mon cœur depuis des générations. On installe des barrages filtrants, on ne veut pas que des jeunes, mal intentionnés, s’introduisent ici et nous plongent dans la terreur, je n’ai pas peur de m’engager pour ne pas que des situations de déjà vu (cf. les événements) se reproduisent […] Je ne laisserai pas mes enfants revivre tout ce qu’on a vu étant petit. »

Eloi Coupry et Margaux Lorenzini

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