Une peine de quatre ans de prison ferme a été prononcée par le tribunal correctionnel de Nouméa qui jugeait un homme de 36 ans qui a pris tous les risques pour échapper aux forces de l’ordre. « Il se croyait dans un jeu vidéo », a témoigné l’un des gendarmes blessés pendant l’intervention.
Les trente condamnations n’ont rien changé. Un constat d’échec pour la justice car autant d’avertissements – plus ou moins sévères – prononcés ces vingt dernières années et d’années passées derrière les barreaux du Camp-Est n’ont jamais permis de le remettre dans le droit chemin. C’est donc avec une nouvelle lourde condamnation que cet homme de 36 ans a quitté le tribunal correctionnel de Nouméa, escorté par les policiers nationaux pour rejoindre la prison de Nouville. Il y a un peu plus d’un an, le trentenaire s’introduit dans une maison d’une vieille dame à Nouméa. Il connaît la victime qui lui apporte de l’aide en lui donnant, de temps à autre, des boîtes de conserve ou en lui achetant quelques fruits et légumes. Il est un peu plus de 3 heures du matin ce 24 juin dernier lorsqu’il décide – sans que l’on comprenne bien pourquoi – de lui dérober son véhicule Mercedes pour une nouvelle virée nocturne.
Seulement, la propriétaire de la voiture s’en rend compte un instant plus tard et a le réflexe de prévenir aussitôt la police nationale. L’information circule sur les ondes des patrouilles, ce qui permet de localiser la voiture volée roulant à très vive allure en direction de Saint-Quentin. « Plusieurs dispositifs d’interception ont été mis en place par la police nationale et municipale et les gendarmes. Vous étiez déterminé à ne pas vous arrêter », raconte la présidente Hélène Gaillet.
Mis en joue, « il est hilare »
Le chauffard réussit à déjouer les contrôles jusqu’au rond-point du lycée du Mont-Dore où il est attendu de pied ferme par des gendarmes. Un véhicule blindé se met en travers de la route au milieu du rond-point et plusieurs herses sont jetées au sol. « Vous avez continué votre route sans vous arrêter et vous êtes allés directement percuter le véhicule de gendarmerie. Vous avez ensuite été mis en joue par des gendarmes mais vous avez continué votre manœuvre. En reculant, vous avez touché le fourgon de police et vous avez réussi à vous dégager de cet endroit », décrit la magistrate.
Attentif, le prévenu apporte quelques précisions et jure « ne pas avoir foncé sur les gendarmes comme un malade » et « avoir ralenti dans le rond-point ». « Je ne voulais pas leur faire du mal », se défend le trentenaire qui s’est ensuite volatilisé dans Saint-Louis. Le véhicule est alors retrouvé incendié en bord de route.
Ce qu’il a vécu cette nuit-là, le gendarme qui témoigne à la barre s’en souvient comme si c’était hier. Il était dans le véhicule percuté de plein fouet par le prévenu. Il a senti un choc immense et s’en tire avec des blessures et un traumatisme psychologique. « Il n’a pas essayé de nous éviter, il n’a pas donné de coup de volant, il a foncé directement sur nous », se souvient ce témoin « choqué » de le voir « hilare au moment de prendre la fuite. Il se croyait dans un jeu vidéo ». Son avocate, Me Nathalie Lepape, a demandé que « la justice rappelle que les délits sur les gendarmes, si pudiques, si silencieux, si respectueux, ne resteront jamais impunis. Je suis atterrée de voir le peu de cas que vous faites de la vie de ces hommes et de ces femmes en uniforme ».
« Il est en marge de la société »
L’avocate de la défense Me Audrey Noyon reprend les auditions du mis en cause et signale que son client a toujours indiqué qu’il n’était pas au courant qu’un gendarme avait pris place dans le véhicule percuté. « Ce 24 juin, les vieux démons sont revenus. Il est en marge de la société, il a arrêté l’école en 5e, il n’a jamais eu de compte bancaire et on continue à l’envoyer en prison d’où il ne sort pas grandi », plaide-t-elle.
Un appel à « lui faire encore confiance » qui ne passe pas du tout chez le procureur de la République Nicolas Kerfridin qui évoque « un cas désespérant ». Il requiert trois ans de prison ferme à l’encontre d’un homme « qui a fait le choix de cambrioler une personne qui lui faisait confiance et lui donnait des pièces et le pari de ne pas s’arrêter devant les gendarmes ».
Le tribunal décide d’aggraver les réquisitions et de le sanctionner d’une peine de quatre ans de prison à purger directement au Camp-Est.
Jean-Alexis Gallien-Lamarche