Le bilan est lourd et l’enquête en cours pour déterminer les circonstances exactes de ce qu’il s’est passé dans la nuit de samedi à dimanche, à la tribu de Touaourou, où deux hommes ont été mortellement touchés par arme(s) à feu.
Ce n’était pas à prévoir, car on ne peut jamais se résoudre à penser que le pire va arriver, mais c’était à craindre. D’ailleurs, la gendarmerie avait renforcé son dispositif dans le secteur. Pourquoi ? Parce que trois semaines plus tôt, la situation avait déjà dégénéré.
La soirée du 27 janvier avait en effet été particulièrement agitée « dans un contexte de conflit interclanique au sein de la tribu de Touaourou », précisait, quelques jours plus tard, le procureur de la République, Yves Dupas. L’enquête avait permis « d’établir qu’une trentaine de personnes appartenant au clan Ouetcho avaient constitué sur la chaussée » deux barrages : l’un formé de cailloux, l’autre « au moyen de pneumatiques et de bois enflammés ». Conséquence : « des membres du clan Kourevi, qui revenaient vers la tribu dans leurs véhicules, étaient ainsi bloqués ». Une bagarre avait alors éclaté.
« Ne pas commettre une nouvelle infraction »
« Quatre personnes du clan Ouetcho subissaient des violences exercées par le clan adverse en utilisant des barres de fer et des sabres d’abattis. » Bilan : des blessés, dont l’un « présentant une fracture de l‘avant-bras et plusieurs lésions sur le corps ». Lors de cette « rixe, trois armes à feu (deux fusils de chasse de calibre 20 et une carabine de calibre 243) étaient exhibées, deux coups de feu ayant été tirés sans provoquer de blessure ». Un drame avait été évité de peu.
L’enquête avait été rapide, la réponse judiciaire aussi. Trois hommes ont reconnu les faits. Deux prévenus ont ainsi été condamnés à un an de prison, dont quatre mois avec sursis. Le troisième mis en cause a écopé de huit mois de prison, dont cinq mois avec sursis. Étant donné que « ces prévenus n’avaient pas d’antécédents judiciaires pour violences, les peines d’emprisonnement ferme n’ont pas été assorties d’une exécution immédiate au Camp-Est, les condamnés ayant la possibilité, au vu de leur personnalité et du quantum de la peine, de solliciter un aménagement de peine devant le juge d’application des peines, sous réserve de ne pas commettre une nouvelle infraction », soulignait le procureur, ajoutant que d’autres condamnations étaient attendues pour « entrave à la circulation et port d’arme de catégorie D (couteau, sabre, morceau de bois) afin de donner une réponse pénale à l’ensemble des infractions commise par les protagonistes des deux clans opposés ».
Cela n’a malheureusement pas suffi à calmer durablement la situation dans cette tribu de la commune de Yaté. Samedi soir, vers 23h30 la gendarmerie a été sollicitée pour un nouveau débordement, à l’issue plus grave que le précédent épisode : deux morts, trois blessés. Les militaires (gendarmes, mobiles, GIGN), chez qui aucun blessé n’était hier à déplorer, ont été envoyés sur place en nombre, une cinquantaine, pour sécuriser la zone, séparer les deux camps, calmer les esprits, comprendre qui a tiré sur qui et pourquoi, et rechercher le ou les auteurs des faits. Ils y ont passé toute la nuit ainsi que la journée d’hier. Une forte présence dans le but de dissuader toute tentative de vengeance punitive.
Anthony Fillet