Deux mois après avoir été maintenu en détention par la chambre de l’instruction, l’ancien chirurgien du Médipôle, condamné en appel pour meurtre, a formulé une nouvelle demande de mise en liberté. La justice a ordonné une expertise médicale.
Il veut faire condamner la France. Olivier Pérès et ses avocats, Me Cécile Moresco et Laurent Aguila, se « préparent » à saisir la Cour européenne des droits de l’Homme face aux refus de la justice de faire droit à ses demandes de mises en liberté. Sept mois après sa condamnation par la cour d’assises d’appel à quinze ans de réclusion criminelle pour le meurtre d’Éric Martinez sur le golf de Tina, en septembre 2018, pour laquelle il s’est pourvu en cassation – il est donc toujours présumé innocent -, l’ancien chef du service de chirurgie orthopédique et traumatologique du Médipôle mène toujours de front son combat judiciaire. Il veut désormais faire appel à une juridiction internationale pour étudier son dossier.
Malgré le refus du 4 octobre dernier de la chambre de l’instruction de le libérer sous contrôle judiciaire ou avec un bracelet électronique « pour un risque de non-représentation et parce que la justice est en train d’organiser son transfert vers la Métropole », Olivier Pérès a formulé une nouvelle demande deux semaines plus tard (le 19 octobre dernier) sur la base d’un certificat médical attestant de graves problèmes de santé qui seraient incompatibles avec une détention au Camp-Est.
« Il est à la limite de la mort »
« Il n’est pas condamné, il est toujours présumé innocent. Nous avons produit des pièces médicales, c’est un homme qui va extrêmement mal. C’est un homme sincère, et la justice dira s’il doit être condamné ou pas, et qu’il souffre de séquelles et de problématiques de santé gravissime. Vous voyez bien que son état de santé ne peut pas s’améliorer, c’est une évidence », a plaidé Me Cécile Moresco devant les magistrats de la chambre de l’instruction, mercredi matin, assurant qu’il était « à la limite de la mort ».
L’avocate s’est également montrée en colère après les annonces faites par le parquet général aux précédentes audiences qui avait indiqué que le transfert de son client dans une prison en Métropole était en bonne voie. « On va le transférer ? Mais quand ? Le parquet général nous avait garanti une solution prochainement. J’ai appelé l’administration pénitentiaire et on m’a répondu que c’était, en l’état, impossible que ça se fasse », a-t-elle appuyé, affirmant aux magistrats de la cour qu’il était de leur « responsabilité » de ne « pas laisser un homme en souffrance au Camp-Est ». « Je suis encore vivant mais on m’annonce ma mort », a lâché Olivier Pérès, à l’apparence amaigrie. « Toute la journée, je piétine difficilement dans ma cellule, je ne peux plus m’asseoir ou m’allonger sur le dos », a décrit le sexagénaire.
En réponse, l’avocat général Philippe Faisandier a reconnu que « le projet de transfert n’avait pas été mis en œuvre mais il ne dépend pas du directeur du Camp-Est mais d’une direction spécialisée ». Le magistrat a ensuite partagé ses interrogations, « est-ce que la situation a évolué dans ce dossier depuis le 4 octobre ? Nous n’avons pas, sur le plan médical, d’éléments nouveaux hormis un certificat médical qui n’est pas une expertise ». Rappelant qu’Olivier Pérès est détenu dans une cellule PMR (pour personne à mobilité réduite) de 15m2 avec deux autres détenus, qu’il bénéficie d’un « régime alimentaire spécifique », qu’il peut « se rendre au CSSR pour recevoir des soins de jour » et qu’il ne « profite pas des deux heures de promenade quotidiennes », Philippe Faisandier a requis à la chambre de l’instruction que soit ordonné une nouvelle expertise médicale pour déterminer si son état de santé est compatible ou non avec une détention et avec « un long vol d’avion vers la Métropole ».
La veuve d’Éric Martinez visée par une enquête
Sur les questions de la chambre de l’instruction, Olivier Pérès a confirmé qu’il serait « d’accord » avec un transfert en Métropole « mais j’en suis incapable actuellement ». « L’administration pénitentiaire vous a proposé une incarcération à la prison de Koné car les conditions sont meilleures. Pourquoi avez-vous refusé ? », interroge le président Philippe Dorcet. « On m’a appelé un matin pour me proposer cette option avec deux possibilités : que je réponde tout de suite et que je n’en parle à personne. Ma famille n’était même pas au courant. On m’a lancé un ultimatum et je n’ai même pas eu le temps de réfléchir. Si je vais à Koné, je perds les visites et les parloirs, mes enfants, les médecins spécialistes et les avocats », a répondu l’ancien chirurgien avant de se féliciter de l’ouverture d’une information judiciaire visant la veuve d’Éric Martinez pour subornation de témoins.
Olivier Pérès a, en effet, toujours accusé Laurence Martinez d’avoir fait pression sur un de ses amis, ostéopathe de formation, qui avait décrit à la police Eric Martinez comme « un sanguinaire » avant de revenir sur ses déclarations plusieurs semaines plus tard, reprochant au policier d’avoir déformé ses propos, assurant qu’il avait utilisé le terme de « caractère sanguin ».
« Nous constatons qu’une nouvelle fois, M. Olivier Pérès formule une demande de mise en liberté alors que la cour d’appel a rejeté la précédente le 4 octobre dernier. Nous nous y opposons puisqu’aucun élément nouveau vient justifier cette libération. Et une fois de plus, la partie civile a subi les attaques de M. Pérès, comme depuis cinq ans dans ce dossier », a souligné l’avocat de la partie civile, Me Martin Calmet.
Cette audience intervient seulement quelques jours après que l’avocat à la Cour de cassation d’Olivier Pérès a déposé un mémoire faisant valoir plusieurs moyens pour aboutir à l’annulation de la condamnation par la cour d’assises d’appel. La Cour de cassation devrait se prononcer dans les prochains mois.
Après en avoir délibéré, la chambre de l’instruction a ordonné une nouvelle expertise médicale qui devra être rendue au 15 janvier. Les magistrats se positionneront ensuite sur la libération ou non d’Olivier Pérès.
Jean-Alexis Gallien-Lamarche